Plus de 45 milliards de pains, subventionnés moyennant des millions de dinars, sont jetés, annuellement, dans la rue par les Tunisiens, a indiqué Mohamed Bouanene, président de la Fédération nationale des propriétairesde boulangeries, relevant de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA). Le pain est, en effet, l’un des principaux produits subventionnés et toute hausse de son prix a provoqué, depuis l’indépendance, des mouvements sociaux à travers le pays.
L’existence de plus de 550 boulangeries anarchiques est à la base de cette production excédentaire de pains, selon Bouanene, en imputant la responsabilité aux autorités de tutelle, tels que les gouvernorats, le ministère du commerce et de l’artisanat La prolifération des boulangeries anarchiques fait que la production du pain n’est plus adaptée au nombre des habitants et à la capacité de consommation des citoyens, favorisant ainsi une concurrence illégale avec les boulangeries autorisées à exercer, a-t-il dit.
Le phénomène des boulangeries anarchiques s’est accentué, surtout, après la révolution (17 décembre 2010/14 janvier 2011), dans la mesure où certaines personnes ont tenu bon à s’installer sans détenir ni carte professionnelle ni autorisation pour ce faire.
L’absence de contrôle et la situation sécuritaire instable du pays constituent des facteurs ayant contribué à l’accroissement de ce phénomène, selon Bouanene.
Expliquant le mode d’activité de ces boulangeries, l’orateur a souligné que celles-ci achètent la farine au prix réel, soit 520 millimes le kilogramme et obtiennent des bénéfices en réduisant le poids du pain et diversifiant les variétés de pain sans se conformer aux prix légaux.
Il a estimé que les gains perçus par ces boulangeries sont importants, du fait que leurs propriétaires ne payent ni impôts, ni cotisations sociales au profit de leurs apprentis et ce, en comparaison avec les boulangeries légales. Et d’ajouter, que fuyant le chômage les personnes travaillant dans ces boulangeries acceptent cette situation sociale, d’autant que l’employeur leur propose des salaires relativement élevés. 1200 autorisations accordées sans besoin réel du secteur:
L’augmentation des quantités excédentaires de pain est imputable, également, à l’octroi de 1200 autorisations de création de boulangeries, sans que le secteur en ait réellement besoin, selon M. Bouanene. Le nombre des boulangeries légales était de l’ordre de 2000, jusqu’à 2009. Après cette date, près de 1200 autorisations ont été accordées sans étudier le besoin réel du marché, a-t-il encore précisé.
Ces autorisations sont accordées au niveau de chaque gouvernorat par une commission composée de représentants du gouvernorat, des ministères de l’agriculture, du commerce et des affaires sociales, ainsi que de la protection civile et du syndicat du secteur. La loi en vigueur stipule que les autorisations sont accordées à toute personne titulaire d’une carte professionnelle, et ce, après le dépôt d’une demande auprès de ladite commission, laquelle se charge de l’étude de l’emplacement de la boulangerie et de l’évaluation du nombre des habitants de la région à approvisionner par celle-ci.
La réglementation fixe, également, la quantité annuelle de farine subventionnée à utiliser laquelle ne doit pas dépasser 4,5 quintaux pour les boulangeries créees après 2009 et qui ne produisent que le petit pain (baguette). M. Bouanene a ajouté qu’avec chaque nouvelle autorisation accordée avec pour corollaire une nouvelle boulangerie en activité, l’Etat subventionne la quantité de farine que la nouvelle boulangerie obtient.