La communication politique, ciblée, percutante et influente. C’est un art dans lequel excelle la vitrine politique de l’organisation des Frères musulmans en Tunisie, «Ennahdha». Une photo montrant Ghannouchi reçu en grande pompe par le président algérien avec tapis rouge aurait suscité l’émoi de centaines de milliers de Tunisiens. C’est le but de la manœuvre, leur faire croire que Ghannouchi et Ennahdha ont aujourd’hui l’appui du voisin le plus proche et le plus puissant de la Tunisie. Mais rien n’est aussi simple, il s’agit de politique, et en la matière, il n’y a ni état d’âme ni sympathie personnelle, il y va des hauts intérêts des Etats et de la sécurité de leurs peuples.
Quoi de plus évident dans le contexte actuel, alors que la Libye est devenue une poudrière et un arsenal à ciel ouvert, que de convoquer le meilleur interlocuteur des extrémistes religieux et leur père spirituel dans le but d’établir des canaux de communication avec les illuminés du 21ème siècle?
Ghannouchi pourrait-il apporter une modeste contribution pour trouver des portes de sortie de crise et de guerres fratricides moins coûteuses dans un pays qui risque de se transformer en 40 Emirats islamistes surarmés et chaotiques? Ne serait-ce pas la meilleure preuve du pragmatisme politique d’un Etat que d’appeler le 1er théoricien islamiste maghrébin à user de son influence morale sur ses disciples en Libye? Celui-là même, qui n’a pas réussi à damner le pion à Youssef Al Kharadhaoui à la tête de l’Union internationale des savants musulmans, réalise qu’il pourrait être un acteur important dans le Nord de l’Afrique. Tant mieux s’il œuvre à calmer les délires des milices extrémistes libyennes et de satisfaire à ses penchants mégalomaniaques de prince des Croyants!
Alger relève l’inexpérience des islamistes tunisiens
Les dirigeants algériens auraient également -et diplomatiquement- relevé le manque «d’expérience» du courant islamiste en Tunisie à diriger les affaires de l’Etat, ce qui explique son échec en tant que gouvernement.
Rien de nouveau. Le peuple tunisien sait que le laxisme du gouvernement de la Troïka face à la montée de l’extrémisme et la prolifération du terrorisme expliquerait grandement la situation sécuritaire incertaine de la Tunisie.
A ce propos, il paraît qu’il y aurait des volontaires ou des mercenaires qui se promènent de taxi en taxi pour diffuser des informations empoisonnées telles: «Les artisans des actes terroristes sont des commandos envoyés par l’Etat pour altérer et détruire l’image du parti islamiste face à ses sympathisants et ses adhérents». Une aberration, de plus, mais ce n’est pas étonnant de la part de personnes passées maîtres dans l’art de la manipulation et de la communication toxique.
Et c’est ce qui s’est passé concernant la visite de Ghannouchi à Alger, la machine de l’adaptation de l’opinion publique aux vœux pieux du Cheikh a démarré pleins gaz, mais les apparences sont toujours trompeuses.