Dans les démocraties qui se respectent, c’est-à-dire des démocraties représentatives fondées sur le pluralisme politique, les partis qui composent le paysage politique parrainent des idéologies opposées mais convergent vers ce qu’on appelle « un stock de valeurs communes ». De la sorte, on peut être un mouvement conservateur, progressiste, capitaliste, communiste, socialiste, populiste, écologiste … mais tous ces mouvements oublient leurs divergences et se mettent d’accord quand il s’agit de la souveraineté nationale, de la haute sécurité du pays, des libertés fondamentales, de la laïcité, de l’éducation …
Abou SARRA
Cette lapalissade m’est revenue à l’esprit en jetant un regard d’ensemble sur la situation politique cauchemardesque qui prévaut, actuellement, en Tunisie. Une situation où on ne voit nulle part de points de convergence voire de points de rencontre – mêmes tactiques – ni entre les partis au pouvoir et les partis d’opposition, ni entre les partis d’opposition eux-mêmes, ni entre les organisations de la société civile et les acteurs politiques.
La lutte contre les sponsors du terrorisme, une cause commune
Cette dissonance criante est particulièrement perceptible entre les partis d’opposition. Ainsi, au moment où Abir Moussi, présidente du Parti destourien libre (PDL), mène, au nom d’un Etat national, une bataille frontale et sans merci contre l’islam politique – déstructurant et ses dérivés djihadistes et terroristes-, les leaders des partis d’opposition progressistes, centristes et ultralibéraux se délectent à se la donner en spectacle.
Ils donnent l’impression que ce combat contre l’islam politique et ses sponsors ne les concerne pas et que si jamais Abir Moussi encaisse des revers, dans le sillage de combat, ce sera bien fait pour elle, car c’est elle qui est allée chercher la bagarre.
C’est dans cet esprit que des leaders « dits historiques » comme Nejib Chebbi, chef du parti Al Amel (coalition de partis espsilonesques), Hamma Hammami (porte-parole du Parti ouvrier communiste tunisien, POCT), un parti qui n’a jamais tenu un seul congrès durant toute son histoire, Fadhel Abdelkefi (nouveau président d’Afek Tounes), un parti d’arrivistes ultra libéral, ont condamné, à gorge déployée, le sit-in observé par Abir Moussa devant le bureau tunisien de l’Union des ulémas musulmans par le prédicateur jihadiste Youssef Al Quardaoui. Ils sont allés jusqu’à qualifier cet acte « pourtant légal » de « fasciste ».
Par contre, ils ont été trop discrets quand les hordes et milices de la coalition extrémiste d’Al Karama et d’Ennahdha ont envahi les lieux et poussé, illégalement, avec le soutien de l’actuel ministre de l’Intérieur (absence de décision du parquet) de lever ce sit-in.
Ces éternels perdants de la politique, comme l’illustre leur échec régulier et cuisant lors des échéances électorales, n’ont pas également osé condamné, avec la fermeté requise, la voyoucratie du député Seif Eddine Makhlouf, porte-parole d’Al Karama quand il a envahi, avec ses députés, la salle d’embarquement de l’aéroport de Tunis-Carthage pour faire voyager de force une “femme fichée S17“, objet de procédures frontalières pour suspicion de lien avec le terrorisme.
La montée d’Abir Moussi soutenue par les intellectuels
Heureusement la bouillonnante députée Abir Moussi, devenue après l’assassinat de Chokri Belaïd, le symbole de la lutte contre l’islam politique, bénéficie de l’appui précieux des intellectuels du pays. Parmi ceux-ci figurent l’écrivain et philosophe Youssef Seddik, la romancière Amel Mokhtar, l’historien Amira Aleya Sghaier, l’universitaire et écrivaine Olfa Youssef. Cette dernière s’est particulièrement distinguée en déclarant dans une vidéo diffusée le 11 mars 2021 que le « PDL est la dernière ligne de défense de la Tunisie et qu’elle se considère comme un soldat au service de ce parti ».
Mention spéciale pour l’appui que la puissante centrale syndicale l’UGTT a apporté à Abir Moussi dans son combat contre la coalition extrémiste d’Al Karama et l’Union des ulémas musulmans. Et pour cause. La Tunisie n’a pas besoin d’ulémas et de sponsors étrangers pour lui apprendre les préceptes de l’Islam.
Quant aux Tunisiens moyens, déçus du rendement des islamistes au pouvoir depuis une dizaine d’années, ils sont de plus en plus nombreux à adhérer aux idées de la passionaria anti-islamiste Abir Moussi et à le prouver dans les sondages. Son slogan simple « en finir avec les khawmjia (ikhwan) » commence à faire mouche.
Pour preuve, selon un sondage publié le 11 mars 2021, par le cabinet Sigma Conseil, le PDL continue de régner sur les intentions de vote aux législatives. Si jamais ces dernières étaient organisées à cette date, le PDL récolterait 43,65%, dépassant de loin Ennahdha crédité de 18,4%, Qalb Tounes (7,8%), le Courant démocratique (4,8%) et la Coalition Al-Karama (4,3%).
Mieux, contrairement à l’ensemble de ses adversaires qui, par l’effet de la crise multiforme que connaît le pays, n’osent pas pointer spontanément le nez en dehors de leurs locaux, Abir Moussi, elle, est en train d’occuper le terrain. Les spectaculaires meetings que le PDL a organisé, ces dernières semaines, à Sousse, à Béja et surtout à Sfax (deuxième ville du pays à majorité islamiste) en sont une belle illustration.
Rassurer les Tunisiens hésitants
Abstraction faite de cette ascension spectaculaire du PDL et des craintes qu’elle peut susciter au sein de ses adversaires politiques, l’équipe d’Abir Moussi se doit, à notre avis, de l’accompagner par un discours parallèle rassurant, au moins sur trois points fondamentaux.
Le premier concerne le non-retour aux pratiques autoritaires, discriminatoires et excluantes des anciennes dictatures…
Le deuxième porte sur le choix du nouvel modèle de développement lequel se doit d’être inclusif, un modèle fondé sur l’équité des chances, l’équilibre régional et l’accès des citoyens à des prestations publiques de qualité acceptable (transport, éducation, santé).
Le troisième serait de ne pas combattre au nom de l’islam politique la religion islamique mais de penser plutôt à séparer la religion du politique et à constitutionnaliser la laïcité laquelle, par principe, n’exclut pas la liberté de conscience et la liberté du culte.
A bon entendeur.