Dérives de l’université tunisienne : Les doyens dénoncent le silence coupable du ministère

universite-lettres-tunisie-a1Les doyens des facultés des lettres, des humanités et des sciences sociales de Tunis, La Manouba, Sousse et Sfax ont dénoncé "le silence et la marginalisation" dont fait part le ministère de tutelle devant "la dérive" enregistrée au sein de l'université tunisienne ainsi que la violence et le désordre provoqués par certaines parties estudiantines qui ne respectent ni le règlement intérieur ni les directives émanant des conseils scientifiques.

Les doyens des universités tunisiennes expliquent dans une déclaration issue de leur réunion mercredi à Sousse que le premier semestre de l'année universitaire 2012-2013 a été marqué par de nombreuses difficultés dont le retard dans la proclamation des résultats des commissions de recrutement et de promotion, le refus de certains étudiants des résultats et des critères adoptés par les commissions des masters, les sit- in et l'appel à la grève lancé par des étudiants de la section de philosophie pour dénoncer, selon eux, "le manque de clarté du cursus". Les doyens des universités relèvent aussi l'entêtement de certaines étudiantes portant le niqab à refuser les directives issues des conseils scientifiques.

Les signataires de cette déclaration ont aussi exprimé leur étonnement en raison du maintien de l'affaire du doyen de la faculté des lettres de la Manouba Habib Kazdaghli qui comparaîtra pour la 4eme fois devant le tribunal de première instance de La Manouba le 3 janvier prochain.

Tout en affirmant leur confiance dans l'indépendance de la justice, les signataires de la déclaration expriment leurs inquiétudes quant au risque "d'instrumentalisation politique" du dossier, évoquant "les pressions et les violences perpétrées par des groupes d'extrémistes religieux tout au long de l'année dernière à l'encontre des enseignants, du doyen et des étudiants de la faculté des lettres de la Manouba". Les signataires considérent que le maintien de l'affaire Kazdaghli jusqu'à la moitié de l'année universitaire en cours constitue "une menace pour les libertés académiques et une atteinte flagrante à l'autorité des doyens, un symbole pour l'université et les universitaires".

Les doyens affirment qu'ils trouvent des difficultés à poursuivre leurs activités dans un climat pareil qui porte atteinte à leurs efforts et constitue une menace quotidienne pour leurs vies et leur sécurité personnelle" mettant en cause l'indifférence du ministère et son refus d'engager un dialogue véritable et une réflexion concernant les difficultés rencontrées.

Par ailleurs, les signataires annoncent le projet de création d'une association des doyens des facultés des lettres, des humanités et des sciences sociales. La principale mission de cette association sera "le suivi des préoccupations pédagogiques et logistiques des établissements universitaires et la réflexion concernant les perspectives pour leurs diplômés".

Les doyens lancent un appel au ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique pour prendre en considération les dangers issus de la lenteur à engager une réflexion à propos des aspects négatifs qui ont résulté de l'application du régime LMD et l'adoption d'anciennes méthodes dans le traitement des problèmes qui se sont accumulés dans les facultés des lettres, des humanités et des sciences sociales.

Ils affirment à ce propos qu'il est désormais urgent que l'enseignement et la recherche dans les domaines des lettres, des humanités et des sciences sociales reprennent leur place dans l'espace académique en vue de la diffusion d'un savoir au diapason de l'époque. Ils expriment aussi la disposition de leurs établissements à participer sérieusement pour relever le défi et pour présenter des propositions concernant ces différentes questions.

Di/TAP