Zied Lakhdhar : Le remaniement ministériel n’a pas fait l’objet de concertations avec les parties au pouvoir

Le député du Front populaire, Zied Lakhdhar a estimé que le remaniement ministériel effectué par le chef du gouvernement, Youssef Chahed a été “une surprise pour tout le monde y compris les parties au gouvernement et les signataires du Document de Carthage”.
“Cela reflète une confusion au sein du gouvernement et un tiraillement entre les parties qui le soutiennent”, a-t-il estimé.

Dans une déclaration lundi à l’agence TAP, Zied Lakhdhar a indiqué que ce remaniement constitue un message codé pour une partie importante de la société, à savoir l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), et toutes les forces qui défendent les travailleurs signifiant “qu’il ya des mesures dont la mise en œuvre par le gouvernement a pris du retard et dont l’exécution lui est imposée”.

La désignation d’un membre du bureau exécutif de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA) à la tête du ministère de la Fonction publique s’inscrit dans le cadre de l’accélération de l’exécution des engagements du gouvernement envers le Fond monétaire international (FMI), engagements qu’illustre la déclaration de la ministre des Finances sur la privatisation des banques publiques et le licenciement des fonctionnaires, a-t-il argumenté.

Le député a appelé à la vigilance face à un “gouvernement faible et confus, entouré par une coalition qui connait des tiraillements”.

Pour sa part, le député de l’Union patriotique libre, Taoufik Jomli, a déclaré que le “remaniement ministériel n’a pas été objectif. Il s’agit d’une réaction aux déclarations de l’ancien ministre de la Fonction publique et de la gouvernance, Abid Briki, sur son intention de démissionner”.
“Il aurait été plus judicieux d’effectuer des remaniements au sein des ministères ayant fait l’objet de critiques tels que ceux de la Santé, du Transport et de l’Education”, a-t-il estimé. Avec ce remaniement “le chef du gouvernement engage un bras de fer avec l’UGTT”, dit-il.

Pour le député du groupe parlementaire démocrate, Imed Daimi, ce remaniement ministériel est “précipité et unilatéral, et n’a pas été précédé d’un dialogue avec les députés sur le rendement du gouvernement”. Pour lui, ce remaniement propose le soutien politique du patronat au gouvernement et ce à la place de l’UGTT.
“Remplacer un ministre de la Fonction publique considéré proche de la centrale syndicale par un représentant du patronat sous-tend un message selon lequel le gouvernement a entamé l’exécution d’une politique de liquidation du secteur public et de privatisation de certaines institutions nationales à l’instar des banques”, a-t-il prévenu.

De son côté, le président du bloc Ennahdha Noureddine Bhiri a déclaré qu’il “aurait été préférable que ce remaniement soit effectué après une concertation avec les signataires du Document de Carthage étant donné que le gouvernement est un gouvernement d’union nationale”.

Il a souligné l’importance du dialogue pour surmonter tous les malentendus et les différends.

“Nous sommes confiants que les signataires du Document de Carthage placeront l’intérêt du pays au-dessus de toutes autres considérations”, a déclaré Bhiri, réaffirmant le soutien au gouvernement Youssef Chahed “car toute confusion va porter atteinte aux intérêts des Tunisiens et à la stabilité et la sécurité du pays”.

Il a aussi rappelé que la nomination ou le limogeage d’un ministre relève constitutionnellement des prérogatives du chef du gouvernement.

Le député Habib Khedher (Ennahdha) estime que les nouveaux ministres ne peuvent pas prendre leur fonction avant que le parlement ne leur accorde sa confiance. Ils doivent ensuite prêter serment devant le président de la République.

La personne désignée à la tête d’un ministère ou d’un secrétariat d’Etat doit nécessairement bénéficier de la confiance de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) qui a la compétence de la lui retirer s’il le juge nécessaire, a-t-il expliqué.

Selon lui, la polémique autour de ces nominations s’explique par la confusion dans l’esprit de certains dans l’interprétation des dispositions de l’article 92 de la Constitution. Cet article accorde au chef du gouvernement la compétence de création, de modification et de suppression de ministères et secrétariats d’Etat ainsi que la compétence de nomination et de révocation des emplois de la haute fonction publique, qui, selon l’ancien rapporteur général de la Constitution, ne comprend pas les membres du gouvernement.

“Le chef du gouvernement a le droit de choisir les membres de son cabinet dans le cadre de la concertation et de la coordination avec les signataires du document de Carthage”, ont déclaré dimanche dans un communiqué commun Nidaa Tounes et Ennahdha, en réaction au remaniement ministériel annoncé samedi.

Les deux partis ont affirmé le rôle important joué par l’UGTT et l’UTICA dans le renforcement de l’union nationale et de la stabilité politique.

Dans le communiqué, signé par le président d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, et le directeur exécutif de Nidaa Tounes, Hafedh Caïd Essebsi, les deux partis ont appelé le chef du gouvernement à se réunir avec les parties signataires du Document de Carthage, pour évaluer le rendement du gouvernement et définir les priorités du gouvernement en cette étape délicate.