Tunisie : Quand le droit à la grève s’oppose aux droits élémentaires des citoyens

Après la grève anarchique des agents de la Société nationale des chemins de fer tunisiens (SNCFT), les agents de la société tunisienne d’électricité et du gaz ont pris la relève, mardi, en entrant en grève ouverte sans préavis.

Les citoyens se sont retrouvés une nouvelle fois face à un mouvement de protestation anarchique qui les empêche de bénéficier de leurs droits étant donné qu’en raison de la grève, même les coupures d’électricité ne sont pas réparées, selon l’un des grévistes de la STEG.

Les citoyens qui se sont adressés de bonne heure aux agences de la STEG n’ont pas pu payer leurs factures et se sont dits indignés de la succession de tels mouvements anarchiques. Pendant cinq jours de suite, la grève des cheminots a aussi empêché les usagers du train de la banlieue sud et des grandes lignes de bénéficier de leurs droits au transport.

Les grèves dans plusieurs établissements publics de la santé, ont aussi empêché les citoyens de bénéficier de leur droit aux soins, sachant que certains ont fait le déplacement de ville en ville et attendu pendant des mois la date du rendez-vous médical.

Au mois d’avril dernier, le Forum tunisien des droits économique et sociaux a enregistré 474 mouvements de protestation individuels (50), collectifs (424), volontaires (273), spontanés (83) et anarchiques (68).

Si les citoyens sont plus ou moins patients quand il s’agit d’une grève annoncée auparavant et organisée, ils sont indignés et révoltés face à un mouvement de protestation anarchique.

« On dirait qu’il n’y a plus de lois dans ce pays, chaque matin on se réveille sur une nouvelle grève//, s’indigne une citoyenne.

« Au nom du droit à la grève, nos intérêts sont à chaque fois suspendus de façon inopportune », ajoute un autre citoyen. L’article 36 de la Constitution tunisienne de 2014 stipule que le droit syndical est garanti, y compris le droit de grève.

« Cependant quand ce droit n’est pas exercé conformément à la loi avec le respect des 10 jours de préavis de grève, l’explication du motif et l’accord de la centrale syndicale, ce droit n’est plus toléré », explique Habib Guiza, secrétaire général de la confédération générale tunisienne du travail (CGTT).

Dans une déclaration à l’agence TAP, Guiza a qualifié la grève des cheminots d’impopulaire qui s’oppose au droit des citoyens au transport surtout qu’elle était anarchique et non organisée.

« La grève a des règles juridiques, politiques et éthiques que les syndicalistes doivent respecter », a-t-il signalé. Il a estimé que de tels mouvements de protestation prouvent l’incompétence et le manque d’expériences des syndicalistes, appelant l’Union générale tunisienne du travail à procéder à une grande réforme et à une nouvelle restructuration.

Guiza a, aussi, appelé le gouvernement à reconnaître le pluralisme syndical afin que les citoyens aient le droit de choisir l’organisation syndicale qui les représente le mieux.

Il a considéré que la poursuite des négociations avec une seule partie qui est l’UGTT met le gouvernement sous pression et le rend obligé de se soumettre à toutes les revendications même si l’Etat n’est plus en mesure, actuellement, de procéder à des augmentations anarchiques.

Pour sa part, Noureddine Tabboubi, secrétaire général adjoint de l’UGTT a souligné, dans une déclaration à l’agence TAP, que pour toutes les grèves observées par l’un des syndicats relevant de l’organisation syndicale une permanence est assurée pour les cas urgents, notamment, dans les secteurs vitaux.

Il a indiqué que l’UGTT tient toujours compte des intérêts des citoyens avant d’observer une grève. S’agissant du cas des cheminots, le responsable syndical a indiqué que l’UGTT a immédiatement réagi et a tenu une commission administrative pour encadrer et organiser cette grève.

De son côté, Sami Tahri, porte-parole officiel de l’UGTT avait, auparavant, déclaré à la TAP que les syndicalistes qui ont participé à la grève subite des agents de la SNCFT ont été interdits de toute activité syndicale et seront traduits devant la commission de règlement intérieur relevant de l’UGTT.

A noter que le code de travail stipule que la réquisition de l’entreprise ou de son personnel peut-être décidée par décret lorsqu’une grève ou un lock-out décidé ou déclenché est de nature à porter atteinte au fonctionnement normal d’un service essentiel.

« Quiconque n’aura pas déféré aux mesures de réquisition sera passible d’un emprisonnement d’un mois à un an et d’une amende de cent à cinq cent dinars ou de l’une de ces deux peines seulement », selon le code du travail indiquant qu’en cas de récidive, ces peines sont portées au double.

Cette décision de réquisition a été prise par le gouvernement, vendredi dernier, pour appeler tous les agents de la SNCFT à rejoindre immédiatement leurs postes.