Tunisie – Société : Le syndicat des enseignants atteint les lignes rouges!

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Lassad Yakoubi jubile! A la sortie de la réunion de la Commission administrative de son syndicat, qui s’est ténue en début de cette semaine, le secrétaire général du Syndicat des enseignants (UGTT) est catégorique comme il a su l’être ces dernières semaines en se positionnant toujours contre! Il déclare à la presse que la Commission a décidé la poursuite de la «lutte» et que, s’il le faut, les enseignants boycotteront les examens du 3ème trimestre et les examens nationaux (baccalauréat, neuvième et sixième).

Lassaad Yakoubi accuse le gouvernement de faire la sourde oreille aux revendications du syndicat et de ne pas réagir!

Les parents d’un million et demi d’élèves ont eu froid dans le dos! Ces déclarations incendiaires du leader syndicaliste à l’apogée de sa gloire depuis l’offensive de cet hiver préfigure le risque insensé d’une année blanche que personne n’ose croire. Pourtant le risque existe!

Mettons-nous d’accord avant d’analyser la campagne «victorieuse» de M. Lassad Yakoubi! Une majorité de Tunisiens estiment sans aucun doute que les situations des enseignants du primaire et du secondaire sont lamentables, difficiles, indignes de ce que nous leur demandons comme effort.

Mieux, la majorité des Tunisiens est d’accord pour dire que l’investissement dans notre système scolaire est la priorité des priorités et que l’amélioration des situations matérielles et pédagogiques des profs et des instituteurs est le préalable de toute réforme de l’enseignement.

Nous sommes en majorité d’accord pour garantir le droit de grève (droit constitutionnel) aux enseignants autant qu’ils l’estiment nécessaire pour faire plier l’administration ou pour faire aboutir une revendication.

Nous sommes également en majorité solidaires des luttes spécifiques des enseignants des écoles, des collèges et des lycées des zones intérieures qui manquent de tout et même de l’essentiel pour fonctionner.

Et les lacunes des enseignants…

Cette solidarité essentielle pour le travail et l’image de tout syndicat qui se respecte semble ne pas avoir été prise en ligne de compte par M. Lassad Yakoubi! Mais cette solidarité là a aussi un revers!

Son revers c’est que nous sommes en majorité conscients également des lacunes de comportement de certains professeurs et instituteurs. Tout en ne voulant pas du tout généraliser les situations, cependant force est de reconnaître que le corps enseignants a aussi ses parasites et qu’ils sont néfastes et dangereux pour lui et surtout pour nous et pour notre école.

Nous pouvons entrer dans les détails. Beaucoup de journalistes savent, preuves à l’appui, de leur part ou de la part des parents d’élèves qui sont leurs fils, leurs frères, leurs voisins ou encore leurs connaissances, que les cours particuliers sont légions et souvent forcés, et ce dès la première année de base.

Ils savent que des cours particuliers sont donnés même dans des matières comme l’éducation physique pour le bac.

Ils savent que les cours particuliers en mathématiques avoisinent les 80 dinars par mois à partir de la 7ème année de base si ce n’est plus.

Ils savent qu’à la faveur du système corrompu de Ben Ali beaucoup d’enseignants ont été recrutés en dehors de toute compétence et qu’ils enseignent aujourd’hui en faisant de fautes d’orthographe indignes de leur corps.

Ils savent que l’absentéisme fait des ravages et que le clientélisme est presque roi pour ceux qui payent les cours particuliers… Ils savent beaucoup d’autres choses aussi sur des sujets de harcèlement de toute nature, sans entrer dans des détails parfois écœurants.

Que dirait Farhat Hachad aujourd’hui?

Alors quand M. Lassad Yakoubi fait sa déclaration triomphante prédisant une possible année blanche pour des milliers et des milliers d’élèves et des centaines de milliers de familles, nous lui disons qu’il va falloir peut-être se ressaisir. Les voies du dialogue sont toujours possibles. Le pays est en guerre, le gouvernement vient juste de prendre ses fonctions et les caisses sont dans un état lamentable. Si on est d’accord pour vos luttes et vos revendications, ne tirez pas trop sur la corde et soyez un peu plus diplomates et surtout un peu plus syndicalistes citoyens dans l’esprit d’un certain grand syndicaliste citoyen, Farhat Hachad, qui savait faire la part des choses entre l’intérêt du syndicat et celui de la nation.

A Bon entendeur, salut!

Ali Chetoui