Tunisie-Présidentielle : Jomaâ sort par la grande porte pour éviter la petite

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«Même si ma route pour entrer au Palais de Carthage est balisée, je me refuse à y accéder par la porte arrière». Une phrase citée par Mehdi Jomaâ, chef du gouvernement, dans son discours annonçant sa décision de ne pas se présenter à l’élection présidentielle.

Reconnaissons que malgré tout ce que l’on peut dire à propos de l’engagement moral qu’il a pris dans le cadre de la feuille de route pour ne participer à aucune activité politique au sortir du gouvernement actuel, il a fait preuve d’humilité, de courage et surtout d’une très grande intelligence et de perspicacité. Il a donné une leçon à beaucoup de politiciens en mal de morale et qui ne l’ont jamais observée dans leurs pratiques car amoraux par excellence. Ce qui revient à dire qu’ils devraient avoir la décence de se taire et la correction d’éviter les insultes inélégantes et inutiles.

Il a fait preuve de courage parce qu’il a réussi à rompre le sortilège du pouvoir et l’envoûtement des courtisans et des inquiets. Car ils étaient nombreux ceux qui se pressaient à sa porte le priant ou bien de garder son poste actuel ou de se présenter à la présidentielle. Pour certains désintéressés, il était l’homme providence car on pouvait lui faire confiance, pour d’autres il représentait le garant de leur maintien au centre du pouvoir. De la Kasbah, ils pouvaient élire domicile à la présidence. Si les prérogatives n’étaient plus les mêmes, les émoluments et le prestige y étaient.

Il n’est pas homme à se laisser manipuler

Il a également montré qu’il n’était pas homme à se laisser manipuler ou utiliser par qui que ce soit. Pour lui, se présenter à l’investiture suprême doit se faire dans la clarté du jour et loin des fourberies, des duplicités et des impostures.

Mehdi Jomaâ était conscient qu’il ne pouvait se présenter à la présidentielle sans qu’il y ait levée de la réserve sur sa candidature incluse dans la feuille de route et acceptation des principaux acteurs sur la scène politique tunisienne de sa personne. Ce qui relevait presque de l’impossible. Et avec tous nos respects pour Sami Tahri, militant avéré de l’UGTT et à la place indispensable et importante de cette honorable institution dans le paysage sociopolitique tunisien, il ne lui revenait pas à lui de dire que les élections pouvaient ou ne pourraient pas avoir lieu, le temps des dictatures est révolu dans notre pays et il n’est pas question que la prochaine soit celle de l’UGTT. Nous aurions aimé qu’il se restreigne à déclarer que l’UGTT ne pouvait cautionner cette «possible» candidature car il y a eu engagement de Mehdi Jomaâ ainsi que des membres de son gouvernement de ne point se présenter à quelques élections que ce soient!

Le chef du gouvernement a été aussi perspicace car il a vu clair dans le jeu de certains partis qui se sont dévoués jusqu’à envoyer leurs militants lui faire la récolte des signatures dans les cafés, usines et autres sources de signatures pour faire croire aux simples des mortels qu’ils le parrainaient.

L’objectif était clair: se débarrasser définitivement de lui dans les prochaines années, car il a montré bon gré, mal gré une résistance à laquelle ces gens-là ne s’attendaient pas. Pire, le but final était de provoquer le chaos dans le pays car entre les protestations et les actions de terrain qui se préparaient pour contester la possible candidature de Mehdi Jomaâ et la guerre des tranchées qui se préparait entre différents partis politiques, ONG et partenaires sociaux, le pays, faute de réussir,ces élections pouvaient aller à la dérive. Sans oublier la question du remplaçant possible du chef du gouvernement et le mécanisme qui aurait permis de le choisir et de le cautionner.

Le meilleur qui pouvait arriver pour un parti comme Ennahdha est qu’il n’y ait pas d’élections, le temps que les Tunisiens oublient ses bavures, ses pratiques peu musulmanes lors de l’exercice du pouvoir et son rôle dans le développement du terrorisme dans notre pays.

Mehdi Jomaâ a tiré son épingle du jeu avec beaucoup de finesse. Il a respecté son engagement malgré les tentations du pouvoir et l’influence des courtisans et a préservé son image auprès des Tunisiens. Il a mis les intérêts du pays au dessus de tout et de tous.

Au lieu de s’acharner sur lui, les familiarisés avec les querelles de mégères devraient en prendre de la graine. Malheureusement la finesse d’esprit et la générosité du cœur ne sont pas l’apanage de tout le monde et surtout pas d’une classe politique folle, folle du pouvoir.+