La réalité des droits de l’Homme en Tunisie d’après Amnesty International

l’ONG Amnesty International (AI) met en cause, dans son rapport 2013 sur la situation des droits de l’Homme dans le monde et dans le volet consacré à la Tunisie, “la persistance de la pratique de la torture” et “l’usage excessif de la violence par la police contre les manifestants”, outre “la discrimination contre la femme dans les textes et dans la pratique” et “le maintien de la peine de mort à l’endroit de neuf personnes sans exécution de la peine”.

Selon le rapport d’AI rendu public, mardi, à l’occasion du 52e anniversaire de l’organisation, la situation en Tunisie s’est caractérisée par “les entraves à la liberté d’expression imposées par les autorités”, des lois datant de l’ère Ben Ali ayant été “invoquées à plusieurs reprises pour accuser des artistes, des bloggueurs et des journalistes d’avoir insulté la religion et troublé l’ordre public”.

S’exprimant lors d’une conférence de presse, la responsable de la section tunisienne d’Amnesty International, Sondes Garbouj, a indiqué qu’en ce qui concerne la Tunisie, le rapport a été focalisé sur les restrictions aux libertés, en particulier la liberté d’expression en tant que domaine dans lequel il y aurait eu, d’après elle, “le plus de cas de violations des droits de l’Homme”.

“Il a été recouru aux mêmes lois qu’utilisait Ben Ali pour emprisonner des journalistes, des bloggeurs, des artistes et des activistes politiques”, a-t-elle dit, qualifiant d'”arbitraire” l’emprisonnement du producteur de télévision, Sami Fehri, compte tenu du fait que la Cour de cassation avait rendu un arrêt, resté sans effet, en faveur de sa remise en liberté.

Sondes Garbouj a, également, relevé que “le gouvernement actuel maintient l’application de la loi sur le terrorisme promulguée sous l’ancien régime (en 2003) dans le but de restreindre les libertés et le droit d’expression”, soulignant d’autre part que l’Etat doit combattre la criminalité et garantir le droit à la sécurité.

Pour ce qui est de la justice transitionnelle, la responsable de la section tunisienne d’AI a fait état de “progrès notables” en la matière, du fait de la pression croissante de la société civile, déplorant par contre la lenteur du traitement des dossiers des martyrs et blessés de la révolution, qu’il s’agisse de la révélation de la vérité ou des procédures de dédommagement.

Evoquant la question de la peine capitale, Garbouj a indiqué que le rapport en a fait état parce que la peine de mort est encore en vigueur et que neuf personnes y ont été condamnées rien que cette année. Le gouvernement tunisien avait rejeté, en septembre 2012, une recommandation du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU en faveur de l’abolition de la peine de mort mais maintenu le moratoire observé de facto depuis 1991, a-t-elle rappelé, précisant que les peines de mort prononcées contre 125 personnes avaient été commuées en détention à perpétuité, mais que 179 personnes étaient toujours en instance d’exécution capitale, fin 2012.

En matière de droits des femmes, Garbouj a relevé que, selon le rapport, les femmes continuent d’être victimes d’un traitement discriminatoire dans les textes comme dans la pratique courante, réclamant au passage l’amendement de l’article 227 bis du Code pénal grâce auquel tout homme coupable du viol d’une femme ou de l’enlèvement d’une mineure peut bénéficier de l’impunité s’il l’épouse.