Cinéma, Palmarès des JCC 2012 : Déceptions, contemplations et satisfactions

Le rideau est tombé samedi soir au Colisée de Tunis, “la reine des salles” sur la 24ème session des Journées Cinématographiques de Carthage, laissant, hormis les distinctions du palmarès officiel, des images et des mots, pour en faire un album spécial JCC 2012. Dans un décor haut en couleurs, la cérémonie de clôture a débuté, sur des airs plutôt mélancoliques, d’un morceau musical du Duo Gharbi “Contemplations”. Un choix des plus judicieux pour bien préparer les hôtes à digérer les saveurs des surprises qui seront annoncées, dans une atmosphère empreinte de “recueillement”.

Des satisfactions certes pour les représentants du cinéma sénégalais qui a raflé la majorité des prix de la compétition officielle: Tanit d’Or et prix du public pour “La pirogue” de Moussé Touré, Prix spécial du jury longs métrages décerné à “Aujourd’hui Tey”, d’Alain Gomis, et Tanit d’Or au documentaire “Président Dia” de Osmane William Nbye.

En dépit de la richesse du langage cinématographique, la force de l’image, la pertinence du texte, le jeu subtil des acteurs, et la dimension humaine qui se dégagent de toutes les oeuvres sélectionnées, il a fallu trancher, dans l’unanimité, malgré les divergences de vues. Cela dit, les arguments des trois jurys ne semblaient pas convaincants, pour les lauréats eux-mêmes.

Aussi bien sur les visages que dans les comportements, les déceptions cachées ou manifestées, se ressentaient. Choisissant de s’éclipser de la photo de groupe, le chargé de prendre le prix du meilleur second rôle masculin décerné à Shadi Haddad pour son rôle dans le film libanais “un Homme d’honneur” de Jean Claude Kodsi, a suscité beaucoup d’interrogations. Alors que le palmarès a fait la part belle en deuxième position au cinéma libanais qui a emporté trois prix, Sabrine Chamaa, n’avait pas l’air d’apprécier la mention spéciale qui lui a été remise pour son court-métrage “Taleta”.

Malgré “le rythme exceptionnel de la fête qui a enjambé le contexte difficile que traverse la Tunisie dans cette période de transition délicate”, comme a souligné le ministre de la Culture,  Mehdi Mabrouk, le cinéma tunisien n’a été récompensé que par deux prix: le prix du meilleur scénario pour le long métrage “Le professeur” de Mahmoud Ben Mahmoud; et un Tanit d’argent pour le court-métrage “Bousculades de 9 avril 1938” de Tarak Khalladi et Sawsan Saya.

Et dire que “les JCC soient toujours une opportunité pour redorer le blason de la créativité”, commente un cinéaste.

“Désolés pour les dysfonctionnements au niveau de l’organisation, désolés pour les imprévus et les désagréments involontaires au niveau du changement de la programmation”, insistait M. Mohamed Médiouni, directeur de la session. Mais les invités avaient un autre avis: “Dommage, non pas pour les imprévus mais pour ces surprises”. Une confrère insiste “Dommage que nos artistes de grand talent, que nos oeuvres de grande qualité, soient ignorés” faisant illusion surtout à Chawki el Mejri et son “Royaume des fourmis”, au documentaire “Nous sommes ici” de Abdallah Yahia et à bien d’autres oeuvres qui méritaient d’être récompensées.

Avec un record sans précédent, soit plus de 100.000 spectateurs qui ont afflué vers les 13 salles de la capitale, la Tunisie a fêté le cinéma et les Tunisiens ont montré leur amour pour le septième art et à toute la mémoire de cette biennale.

Mais dans la solennité de cet événement, un devoir de mémoire oblige. L’hommage à l’Algérie qui n’a eu aucune distinction officielle, est à signaler. Même si le chef d’oeuvre bouleversant “Les parfums d’Alger” aurait été épargné, les propos de Abdelhakim Meziani, membre du jury court métrage étaient porteurs de senteurs à travers des clins d’oeil à la mémoire collective qui unit les deux pays: Sakiet Sidi Youssef.

De l’histoire des médailles et de ses revers, un court tour d’horison s’impose sur un au revoir après la bienvenue aux amoureux du cinéma. La fête des retrouvailles s’est terminée, certains ont quitté déjà le pays, d’autres se préparent au retour laissant dans les annales de cette session de belles images, beaucoup d’émotion et des interrogations multiples.

Au delà de l’unanimité-divergences, satisfactions-déceptions, “les soldats de l’ombre”, eux, avaient un seul souci : donner à voir les 210 films de 34 pays pour un public “fidèle et magnifique” qui a atteint cette année un chiffre record: plus de 100.000 spectateurs. Un chiffre à prendre en considération, pour préparer au mieux la 25ème édition des JCC 2014.

Di/TAP